LPHF: le nouveau règlement lié aux désavantages numériques est difficile à juger
MONTRÉAL — Depuis sa création, les dirigeants de la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF) tentent de sortir des sentiers battus, voire même, peut-être, devenir des pionniers. L’un de leurs outils pour y arriver semble être le livre des règlements. Reste à voir si, parfois, c’est à tort ou à raison.
L’année dernière, la LPHF s’est particulièrement mise en évidence en instaurant ce qui est appelé, en anglais, le «Jail Break Rule».
Ce règlement inédit, qui a semblé plaire à la grande majorité des observateurs, vient mettre fin à une punition lorsque l’équipe qui joue en désavantage numérique marque un but.
Voilà que cette année, la ligue est arrivée avec une nouvelle initiative qui aura, elle aussi, une incidence sur le jeu en désavantage numérique. Une incidence que quatre des six équipes du circuit ont commencé à découvrir dans le cadre de deux matchs préparatoires, mercredi après-midi à Montréal et à Toronto.
Le règlement en question, surnommé «No Escape Rule» (règle de la non-évasion), annoncé par la ligue mardi — donc une fois les camps d’entraînement en marche — oblige les joueuses de l’équipe qui écope une infraction, qui mène à du temps de punition affiché au tableau indicateur, à demeurer sur la patinoire jusqu’après la mise en jeu relançant l’action.
En expliquant leur décision dans un communiqué, mardi, les dirigeants de la ligue reconnaissaient que cette contrainte pourrait mener à une situation où l’équipe punie amorcera une infériorité numérique avec trois attaquantes et une défenseuse jusqu’à ce qui lui soit possible d’effectuer un changement.
Or, c’est exactement ce qu’a vécu Kori Cheverie, l’entraîneuse-chef de la Victoire de Montréal, lors du match préparatoire contre le Fleet de Boston, mercredi à l’Auditorium de Verdun.
À une question qui lui a été posée sur l’emploi de différentes joueuses lors de désavantages numériques face au Fleet, Cheverie a carrément reconnu que c’était lié au nouveau règlement.
«C’est la raison pour laquelle (l’attaquante Mikyla) Grant-Mentis a joué à la défense. Je ne voudrais jamais que Grant-Mentis joue à la défense parce qu’elle doit marquer des buts. Elle n’a pas besoin de les empêcher!», a lancé Cheverie sans la moindre amertume dans la voix.
Consciente que le règlement est là et que toutes les équipes devront s’y ajuster, Cheverie n’était quand même pas prête, mercredi, à offrir une opinion définitive sur son appréciation de cette nouveauté.
C’est la raison pour laquelle elle a répondu «pour maintenant, oui, mais on verra» (en français).
C’est que Cheverie avoue apprécier tout ce qui est lié au désavantage numérique. C’est une facette des unités spéciales sur laquelle elle aime beaucoup travailler, a-t-elle mentionné.
«L’objectif est de créer plus d’offensive et c’est correct. Mais j’ai vraiment une haute opinion des joueuses qui évoluent en désavantage numérique. Avec cette nouvelle règle, quel est le rôle de nos filles qui jouent en désavantage numérique? On enlève des responsabilités aux joueuses», a-t-elle dit.
Rencontrée avant le match, la gardienne de but Elaine Chuli pense que cette règle pourrait mener à plus de buts en avantage numérique, ce que croit aussi l’attaquante Maureen Murphy.
«C’est le match numéro 1, nous essayons, en tant que ligue, de nous démarquer et nous nous sommes déjà démarquées», a souligné Murphy, qui ne s’oppose pas à des mesures pouvant accentuer l’aspect offensif dans le contexte où la ligue, estime-t-elle, compte sur des gardiennes de but de grande qualité.
Si l’objectif de base du règlement est d’accroître le nombre de buts en avantage numérique, il n’a pas été atteint mercredi, ni à Montréal, ni à Toronto.
Dans le duel entre la Victoire (0-en-3) et le Fleet (0-en-4), les deux formations ont été blanchies en sept tentatives avec l’avantage d’une joueuse. À Toronto, les joueuses du Frost du Minnesota (0-en-3) et des Sceptres (0-en-1) n’ont pas réussi à trouver le fond du filet en quatre occasions en avantage numérique.
Selon la directrice générale de la Victoire, Danièle Sauvageau, ce règlement va au-delà du simple fait d’accroître le jeu offensif.
Elle croit qu’il aura une incidence sur la stratégie, notamment au niveau de la gestion des changements de joueuses sur la patinoire, un aspect fondamental du hockey, estime-t-elle.
Sauvageau pense aussi que le règlement aura des répercussions sur le niveau d’alerte et la discipline que les joueuses devront afficher, notamment vers la fin de leurs présences sur la glace pour éviter d’écoper une punition et placer leur équipe dans une situation difficile.
Ce qui semble évident, c’est que ce règlement nécessitera des ajustements que l’on pourrait percevoir lorsque la saison régulière sera en marche.