La centralisation des analyses tourmente les technologistes médicaux
SANTÉ. Le projet Optilab du ministre de la Santé, Gaétan Barrette, qui vise à centraliser 70 % des analyses médicales en un seul endroit dès 2019, n’enchante guère les technologistes médicaux des hôpitaux affiliés au CIUSSS de l’Estrie-CHUS. Ces derniers craignent pour la qualité du service offert.
Réduction des analyses dans les hôpitaux régionaux, mouvement de personnel, centralisation du travail en laboratoire au CHUS-Fleurimont, réorganisation du système informatique et mise en place d’un plan de transport d’échantillons en Estrie. Les technologistes médicaux ont appris les grandes lignes du projet Optilab lors d’une vidéo-conférence diffusée ce matin en présence des instances du CIUSSS de l’Estrie-CHUS.
Dans les faits, le projet Optilab prévoit le maintien des analyses prioritaires (urgence, soins intensifs) dans les laboratoires associés au CIUSSS. La balance des échantillons prendra la direction du CHUS-Fleurimont afin d’être traitée. Un projet dénoncé par l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS). «Dans nos laboratoires, il y a déjà des pertes et des bris d’échantillons. Quand on va avoir 100 km de route (à faire), on peut s’imaginer ce qui pourrait arriver», a indiqué Emmanuel Breton, répondant politique à l’APTS.
La réingénierie des laboratoires médicaux préoccupe les technologistes et les techniciens des laboratoires quant à la rapidité du traitement de l’échantillon. «Il va y avoir de l’attente pour les résultats et du stress (pour les patients)», soutient M. Breton.
Technologiste depuis 16 ans à l’hôpital de Granby, Isabelle Mantha craint l’inefficacité du projet OPTILAB. «Le projet Optilab pour Granby, c’est 62 % des analyses vers Sherbrooke. Comment s’assurer que les analyses vont être traitées dans un délai raisonnable?», se questionne la professionnelle de la santé.
Venu soutenir les travailleurs et les travailleuses de laboratoire, le docteur Jean Joly, microbiologiste à l’hôpital de Granby, s’est dit peu convaincu du bien-fondé d’une réorganisation de la sorte. «Il y a des aspects rationnels (dans ce projet), mais il y en a d’autres qui sont irrationnels.» «Il y a des analyses locales qui devraient rester localement», prétend le microbiologiste. Conscient que la commande politique vient d’en haut (Québec), le docteur Joly croit que l’expertise médicale dans les hôpitaux pourrait se perdre à la suite de ce changement organisationnel.
Sur le plan des relations de travail, l’entrée en vigueur d’Optilab annonce aussi des déplacements de travailleurs vers Sherbrooke et des mouvements de personnel sur les quarts de travail. Une situation décriée par l’APTS.
Déjà en surcharge au CHUS
Au CHUS-Fleurimont, il se traite en moyenne entre 2000 et 2500 échantillons par jour. À ce nombre s’ajouteront les autres analyses des hôpitaux de l’Estrie dès 2019. Déjà en surcharge de travail, les techniciens et les technologistes en poste à Sherbrooke ne voient pas poindre la lumière au bout du tunnel à court terme.
«Au CHUS, les techniciens à la base, on ne sait pas trop ce qui se passe. On voit les volumes augmenter», affirme Carine Bergeron, technicienne médicale. «On traite plus de 2000 spécimens par jour (…). Lorsque les échantillons vont nous être livrés, comment savoir si le spécimen est urgent», se demande Mme Bergeron.
Selon la technicienne, les laboratoires actuels du CHUS ne seraient pas en mesure d’accueillir un aussi gros volume d’échantillons. Un agrandissement des lieux serait nécessaire, avance Mme Bergeron.
Optilab en région
La réorganisation des analyses médicales prévoit le maintien de certains services dans les hôpitaux régionaux en Estrie. Voici le portrait:
Val-Saint-François: 10 %
Mégantic: 30 %
Des Sources: 30 %
Coaticook: 30 %
Magog: 37 %
Granby: 38 %
BMP: 40 %
Hôtel-Dieu: 61 %
Source: APTS