Le délestage de la COVID-19 pénalise «inutilement» les patients magogois
SANTÉ. L’unique médecin anesthésiste de l’hôpital magogois monte au front pour dénoncer un délestage qui s’éternise inutilement, à ses yeux. Le docteur Yves Arcand peste contre cette situation qui prive des centaines de patients de soins importants, comme par exemple une chirurgie d’un jour ou un diagnostic.
Ce médecin anesthésiste comprend très bien la décision de fermer le bloc opératoire, des cliniques externes en médecine spécialisée et du service d’endoscopie (gastroscopie et coloscopie), le 23 décembre dernier au plus fort de la cinquième vague de la pandémie. Cependant, il digère moins bien ces arrêts prolongés qui risquent de se poursuivre jusqu’au 7 février.
«Il était nécessaire de déplacer du personnel vers les soins de longue durée pendant les Fêtes, concède M. Arcand. On aurait toutefois dû rouvrir partiellement ou complètement ces services à compter de la mi-janvier, car des membres du personnel délesté étaient en surplus sur les autres étages. On aurait dû les ramener progressivement pour soigner nos patients en attente.»
Le docteur Arcand cible la gestion centralisée du CIUSSS de l’Estrie-CHUS pour expliquer les listes d’attente qui s’allongent et des centaines de patients qui endurent leur douleur à la maison. «C’est inadmissible d’empêcher un patient de dormir en raison d’une pierre au rein ou d’un autre qui risque de voir son cancer s’aggraver faute de soin», s’insurge ce médecin en arrêt de travail depuis quelques semaines.
À ses yeux, une gestion plus locale ou la présence d’un gestionnaire dans l’hôpital aurait facilement permis de déceler la disponibilité du personnel après trois semaines de délestage, et ce, sans enfreindre les mesures sanitaires ni baisser la garde contre la COVID-19.
Pour sa part, le CIUSSS de l’Estrie-CHUS envisage une reprise d’activités dans ces secteurs dans les prochaines semaines en raison de l’actuelle situation pandémique favorable. «On assure suivre la situation de très près, mais il est actuellement trop tôt pour avancer une date», explique le CIUSSS de l’Estrie par voie écrite. On n’a pu s’entretenir avec un porte-parole de l’établissement pour commenter davantage sur la réouverture des départements et sur une possible gestion locale.
UN DÉFICIT DE 5000 CHIRURGIES
Retrouver une plus grande autonomie permettrait même de mieux gérer les horaires de tout le personnel de l’hôpital, aux yeux du docteur Arcand, même sans épisode pandémique. «Nous estimons le déficit en chirurgie à environ 5000 depuis trois ans à cause d’une gestion externe, déplore-t-il. On planifiait précédemment nos horaires à l’interne en s’organisant notamment pour prendre nos vacances en même temps au bloc opératoire. Depuis quelques années, des congés à gauche et à droite amputent souvent nos équipes et éliminent des journées qui étaient habituellement disponibles pour ces interventions.»
Il craint maintenant le départ volontaire d’employés compétents et expérimentés ou en congé de maladie, en raison de cette gestion centralisée à Sherbrooke. «Ça s’en vient et ça me fait peur», s’inquiète le médecin anesthésiste.
À l’inverse, il ne partage pas les craintes de certains membres du personnel à l’égard de l’avenir du bloc opératoire. «On a cependant travaillé fort pour conserver ce service à Magog, rappelle-t-il. On ne doit pas perdre ces acquis, car ça risquerait d’affecter des services comme les cliniques externes et l’endoscopie, car ces trois départements sont tous liés.»
Rappelons que le Comité de vigie de l’hôpital Memphrémagog milite également pour une gestion plus locale depuis quelques années.