Envasement au ruisseau Castle: l’APARC dénonce une «inaction» de 20 ans
ENVIRONNEMENT. L’Association pour la protection et l’aménagement du ruisseau Castle profite de l’actuelle campagne électorale pour tenter de réactiver son dossier concernant l’accumulation de sédiments dans ce cours d’eau et dans le lac Memphrémagog.
Son président Pierre Clermont s’impatiente de prêcher presque seul dans le désert. Il dénonce une vingtaine d’années de quasi-inaction de la part de Québec et de la Ville de Magog. « On additionne les études et on a enlevé l’équivalent de 400 camions de dix roues dans le ruisseau depuis deux décennies, informe-t-il. Ça demeure cependant que des analyses et du curatif sans qu’on solutionne le problème pour de bon. »
Il déteste entendre les politiciens répéter inlassablement qu’ils régleront ce problème rapidement, et ce, à toutes les campagnes électorales municipales et provinciales. « Vidanger occasionnellement la fosse Broadbent du ruisseau demeure un faible impact, car il y a autant de sédiments qui ne sont pas captés et qui se sont rendus à l’embouchure du lac et dans la baie de Magog, s’inquiète-t-il. On risque de devenir une autre Venise-en-Québec, au lac Champlain, avec des eaux plus chaudes et une prolifération d’algues d’ici quelques années à peine. »
M. Clermont prévient les élus, les environnementalistes et les gens d’affaires qu’ils sont tous concernés par cette problématique. Selon lui, d’autres sédiments s’ajoutent constamment aux quelque 10 000 mètres cubes de sédiments déjà accumulés dans la baie de Magog.
Retour des eaux brunes en début de semaine
Il cite l’exemple des pluies accumulées depuis le week-end dernier qui ont provoqué un autre « coup d’eaux brunes » dans le ruisseau. « Il s’agit d’un exemple supplémentaire qui prouve qu’il ne s’agit que d’une question de temps avant que l’envasement envahisse la baie de Magog », s’inquiète le président de l’APARC.
Plusieurs bernaches se sont aussi installées sur les accumulations de vase à l’embouchure du lac, là où leurs excréments contaminent aussi les eaux du lacs.
« Outre les évidents problèmes environnementaux, il sera peut-être trop tard quand on sera obligé de fermer des plages et que la valeur des propriétés diminuera, prévient M. Clermont. Cela pourrait se produire dans quatre ans si on conserve le statu quo. »
Ce dernier rappelle qu’une table de concertation a pourtant été créée en 2015 avec une vingtaine de partenaires. Un plan d’intervention a été unanimement adopté l’année suivante, mais peu d’actions ont été réalisées, au grand dam de M. Clermont. « Nous connaissons les sources de cet envasement, mais on n’a seulement vidangé qu’à cinq reprises, sans réduire la quantité de sédiments qui s’accumulent constamment dans le ruisseau et le lac », déplore-t-il.
M. Clermont remercie la Ville de Magog pour avoir payé les coûteuses vidanges de la fosse Broadbent au fil des ans, mais il s’attendait à plus de la part des élus magogois. Datée du mois d’août 2019, une lettre de la Ville de Magog vantait la présence d’un plan qui s’appuyait « solidement » sur plusieurs années de recherches et d’acquisition de connaissances. « Nos ressources financières sont cependant limitées à 200 000 $ annuellement pour des projets pour l’ensemble de nos cours d’eau, ce qui nous oblige souvent à repousser des projets d’une année à l’autre », lit-on.
La lettre signée par la mairesse de l’époque, Vicki-May Hamm, aujourd’hui candidate du Parti libéral dans Orford, suggérait à l’APARC de sonder du côté de Québec pour obtenir des subventions.
M. Clermont poursuit en disant que le candidat de la Coalition avenir -Québec, Gilles Bélanger, promettait pourtant de « régler rapidement une grosse problématique », lors de la campagne électorale de 2018.
M. Clermont est convaincu que des travaux près de l’autoroute 10, les pluies et la fonte des neiges sur les pentes du Mont-Orford et le ruissellement de tous les terrains riverains expliquent le problème de sédimentation. Il accepte néanmoins la dernière décision de la Ville de Magog de réaliser une étude scientifique sur 12 mois pour connaître et déceler les sources exactes et précises.
La mairesse Nathalie Pelletier préfère attendre les conclusions de cette analyse avant de se prononcer. « Ce bilan sédimentaire devrait être déposé au plus tard l’été prochain, informe-t-elle. Il nous permettra de prioriser nos actions et de mieux cibler les endroits où intervenir. On fera assurément un suivi d’ici la fin de 2023, car c’est le temps de travailler davantage en amont. »
« Les élus doivent comprendre que l’envasement est un problème aussi important au lac Memphrémagog que la prolifération des espèces envahissantes, comme les moules zébrées, et l’agrandissement du dépotoir à Coventry, au Vermont, plaide-t-il. Tous doivent s’impliquer, car il s’agit d’un problème plus global que le ruisseau Castle à lui seul. »