L’été québécois de Dany Flanders en Floride
STANSTEAD. L’artiste-chanteur établi dans le sud-est des États-Unis depuis 30 ans ne verra pas son Stanstead natal cette année en raison des tracasseries liées à la pandémie de Covid-19.
C’est avec regret qu’il ressasse le souvenir de ses parents à Rock Island en Estrie. Nostalgie et mélancolie sont mêlées à sa voix un brin morne : pas de séjour au chalet sur le lac Lyster comme il est de tradition chez les Flanders. Non pas qu’un citoyen canadien en Floride n’a pas le droit de s’offrir une vue imprenable sur le mont Pinacle, tant s’en faut ; mais à quoi sert-il de prendre des vacances en quarantaine ? «Rentrer pour être obligé de s’enfermer, ça ne vaut pas la peine dans le fond», subodore le chanteur sur un air d’amertume. Il égrène difficilement le chapelet affligeant des rendez-vous manqués. Spectacles à Magog, Sherbrooke, Québec, etc. Tout a été annulé. «Nous sommes désappointés», confie le stansteadois habitué aux bonnes réjouissances d’été.
Un virus a tout fichu par terre, mais il ne s’en prive guère. Le chanteur offre des spectacles dans sa cour en avant avec ses voisins «pour changer le mood» et alléger le confinement. «Mes voisins me demandaient quand est-ce que je vais encore m’installer», se rappelle-t-il presque en s’esclaffant d’une voix tressautant subitement d’aise. Ça fait du bien de revivre. Et Dany s’y est aussi mis pour les internautes. L’un de ses plus récents spectacles virtuels était offert à l’occasion de la fête du Canada le 1er juillet avec le consulat canadien de Miami.
Effroi et regain de vie
Aux États-Unis, la Floride vient d’arracher à la Californie le record de 15 mille nouveaux cas de COVID-19 en 24 heures. Dany Flanders reste serein. «La situation n’est pas aussi pire que les médias le disent, on a ce nombre, mais on a surtout plus de tests», analyse-t-il d’un ton faussement stoïque : «tout était fermé mais quand on a rouvert les portes, on a vu que les gens étaient prêts à revivre.» Le musicien a hâte de transmettre ses émotions au travers de la scène, mais son enthousiasme se heurte aux restrictions du comté de Miami : pas de regroupements à l’intérieur, masques obligatoires, etc. Il ne reste plus que les terrasses pour communier avec les Floridiens, mais personne ne peut aller plus vite que la musique.
La reprise est lente et l’économie tourne au ralenti au grand dam des artistes. «Les restaurants qui ne peuvent opérer qu’à 25 % ou 30 % de leurs capacités mettent les priorités ailleurs», explique Dany Flanders avec le souhait que la vague de contamination actuelle soit déjà la seconde et la dernière. Quoi qu’il en soit, Dany survivra. Sa conjointe Chantal Goudreau n’a jamais arrêté de travailler. L’infirmière en charge d’un département de neurologie a été suivie dans sa profession par leur fille Janelle.
Résilience et incertitude
L’immigrant enraciné a donc plus d’une corde à son arc. Il ne s’agit pas de choisir entre le clavier, la guitare, le saxophone ou sa voix, tous des «instruments» au service de son talent, mais de reprendre son métier d’agent immobilier. Son sens des affaires lui prédit une saison de vaches grasses, mais encore faut-il rester prudent dans les supputations.
«Les Canadiens pourraient se dire que c’est le moment de vendre leur propriété, mais si tout le monde vend, le marché sera inondé et les valeurs vont chuter.» L’autre hypothèse suggère qu’ils fassent du profit pour en racheter l’année prochaine, mais rien n’est joué d’avance. Les «snowbirds» qui immigraient dans l’État ensoleillé pour six mois se contentent désormais de l’hiver, mais sans assurance contre la COVID-19, ils pourraient vite déchanter. Cette frange des propriétaires immobiliers vivant entre le Québec et le sud-est des États-Unis constitue la niche de Dany Flanders, promoteur québécois de RE/MAX en Floride.
Après plus de 30 ans de musique, sa réputation n’est plus à faire. Il en a pris la touche en sortant des entrailles de sa mère, musicienne et joueuse de piano. Son vaste répertoire a davantage conquis les cœurs dans les bars et les croisières à travers des rythmes dont le soul et le rock n’roll. En 2013, il est finaliste de la première saison de La Voix qu’il considère comme «un genre de tatouage qui reste sur le corps». Son faible pour Ray Charles lui donne une préférence pour le clavier, mais il ne se lasse pas d’écouter Gerry Boulet dont les mélomanes commémorent les 30 ans de son décès ce samedi 18 juillet. (Le Reflet du Lac)