Étude: le manque de saumon ne serait pas le problème des orques menacées d’extinction

VANCOUVER — Une hypothèse clé sur la diminution du nombre d’épaulards résidents du Sud impute la faute à un manque de saumon, mais une étude de l’Université de la Colombie-Britannique a révélé que ces orques ont deux fois plus de saumons chinooks disponibles en été que leurs cousins du Nord, qui sont beaucoup plus en santé.

Les chercheurs ont passé des mois à suivre la nourriture préférée des deux populations de baleines dans la mer des Salish et dans les eaux du nord de l’île de Vancouver. Leurs conclusions ont été publiées dans la revue scientifique PLOS One.

Le coauteur du rapport et directeur de l’unité de recherche sur les mammifères marins de l’université, Andrew Trites, a dit qu’ils n’ont pas trouvé ce à quoi ils s’attendaient.

«C’était surprenant», a déclaré M. Trites en évoquant sa première réaction face à leur découverte.

«Lorsque vous trouvez ce à quoi vous ne vous attendiez pas, vous examinez encore plus attentivement vos données et votre première pensée est que vous avez dû faire quelque chose de mal.» Le dernier recensement de ce mois-ci des résidents du Sud en voie de disparition a révélé qu’ils ne sont que 73, contre une population croissante de résidents du Nord d’environ 300.

M. Trites a déclaré qu’ils ont vérifié deux fois et trois fois le nombre de saumons trouvés au cours de l’été 2020.

«Je suppose que j’ai appris avec le temps que nous devons être prudents pour ne pas sauter aux conclusions hâtives», a-t-il mentionné.

Le rapport a révélé que le saumon chinook était deux fois plus répandu dans les zones d’alimentation des résidents du Sud que dans celles des résidents du Nord.

«Cela implique que les épaulards résidents du Sud ont un meilleur accès au saumon chinook que les résidents du Nord pendant l’été — et que toute pénurie alimentaire à laquelle les résidents du Sud peuvent être confrontés se produit à d’autres moments de l’année, ou ailleurs dans leur aire de répartition», indique l’étude publiée le 10 octobre.

M. Trites a fait savoir que les chercheurs ont collaboré avec des pêcheurs commerciaux et sportifs ainsi que des entreprises d’observation des baleines pour identifier les zones d’alimentation depuis l’entrée du détroit de Juan de Fuca au large du sud de l’île de Vancouver et de l’embouchure du fleuve Fraser, jusqu’aux eaux au large de l’extrémité nord de l’île de Vancouver.

L’écart croissant entre les populations de ces deux groupes de baleines piscivores a été attribué à diverses différences écologiques et biologiques entre les régions, comme la disponibilité du saumon, la compétition, les perturbations physiques, le bruit sous-marin, les contaminants et la consanguinité.

«Cependant, la disponibilité de la nourriture joue probablement le plus grand rôle dans la limitation de leur capacité de charge», spécifie l’étude à propos des résidents du Sud.

M. Trites a expliqué que le bruit est plus courant dans les eaux du Sud, ce qui empêche les résidents du Sud d’attraper des proies.

«C’est un peu comme entrer dans un supermarché très fréquenté et faire les courses avec quelqu’un d’autre, mais vous ne pouvez pas vous dire ce que vous devez acheter parce que c’est trop bruyant.

«C’est tellement agité avec autant de monde que vous ne pouvez pas vous entendre, vous ne pouvez pas parler de ce que vous essayez d’obtenir pour le dîner», a illustré M. Trites.

L’étude a révélé que le bruit des navires peut «masquer la communication» entre les membres du groupe et interférer avec la recherche de nourriture et la navigation – tandis que la présence physique des navires peut également réduire les efforts de recherche de nourriture.

«Les épaulards sont plus susceptibles de rencontrer un plus grand nombre de navires dans la mer des Salish que dans les eaux du nord (de l’île de Vancouver), ce qui pourrait signifier que le saumon est moins accessible aux résidents du Sud qu’aux résidents du Nord malgré une plus grande abondance de saumon chinook», a relevé l’étude.

M. Trites croit que certaines personnes pourraient trouver difficile d’accepter les résultats de l’étude, mais cela pourrait amener les gens à reconsidérer leurs hypothèses.

«Et je pense que si nous voulons vraiment sauver les épaulards résidents du Sud, nous devons penser plus grand et ne pas supposer que nous avons résolu le problème, car si nous nous trompons, nous les condamnons à l’extinction», a alerté M. Trites.